
Au terme de l’exercice 2024, la Société sucrière du Cameroun (Sosucam), filiale du groupe Somdia, devrait afficher des pertes totalisant 22 milliards de FCFA, a révélé un responsable à Investir au Cameroun. En attendant la publication du rapport annuel d’activités de l’entreprise, ce chiffre a été confirmé le 19 février lors d’une conférence de presse par le directeur général adjoint, Jean-François Ntsama Etoundi.
Selon la DGA de cette agro-industrie, dont le périmètre sucrier (près de 19 000 ha) s’étend sur les arrondissements de Mbandjock, Nkoteng et Lembe-Yezoum, les pertes s’élevaient déjà à 15 milliards de FCFA au cours de l’exercice 2023.
Concernant les raisons de ces pertes, le DGA a évoqué l’augmentation du coût des intrants, la hausse de la fiscalité, des ventes largement inférieures aux prévisions, ainsi qu’une production en deçà des projections.
Ainsi, la source citée plus haut explique qu’en 2024, la Sosucam avait tablé sur une production de 90 000 tonnes de sucre. Mais à la fin de la campagne, seulement environ 70 000 tonnes avaient été produites. Des chiffres plus ou moins confirmés par le DGA, qui évoque une production attendue entre 85 000 et 90 000 tonnes.
Plan social
Un autre responsable explique que les mauvaises performances de ces dernières années trouvent également leur origine dans la campagne de 2021, au cours de laquelle les objectifs n’avaient pas été atteints en raison d’une saison sèche plus rude que d’habitude. Plusieurs syndicalistes approchés soulignent que cela justifie « partiellement » le plan social engagé par la direction depuis lors.
En effet, depuis 2021, pas moins de 430 employés ont été licenciés « pour faire face aux difficultés financières », rapporte l’un des syndicalistes de la Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun. Une nouvelle vague de licenciements, prévue en 2024, a été bloquée après l’intervention du gouvernement camerounais à travers le ministre Grégoire Owona du Travail et de la Sécurité sociale.
Perspectives moroses pour 2025
Avec la crise qui a paralysé l’entreprise pendant près de deux semaines en pleine campagne sucrière, les perspectives pour Sosucam en 2025 ne s’annoncent pas reluisantes. Les pertes enregistrées par la filiale du français Somdia, au cours de cet épisode, marquées par l’humeur des travailleurs saisonniers, se chiffrent à 5 milliards FCFA, avec près de 1 000 hectares de plantation calcinés et 50 000 tonnes de canne à sucre perdues.
Du 26 janvier au 8 février, des coupeurs de canne en colère, réclamant une revalorisation de leur salaire de base et de meilleures conditions de travail, ont déclenché une grève qui a dégénéré en émeutes. Après des discussions avec la direction générale, le salaire de base a été relevé de 5 FCFA de l’heure, passant de 280 FCFA à 285 FCFA. Cette augmentation, jugée insuffisante par certains travailleurs, a conduit à la désertion des plantations. Face à cette situation, la direction générale s’est vue contrainte de recruter à nouveau 600 coupeurs de canne pour combler le déficit et atteindre les objectifs de la campagne en cours.
Leader du marché camerounais du sucre, la Sosucam, créée en 1965, est détenue à 74 % par des capitaux français et à 26 % par l’État du Cameroun. L’entreprise revendique 8 000 emplois directs et indirects, avec une masse salariale annuelle de 14 milliards de FCFA. Malgré son positionnement stratégique, la Sosucam confrontée à des difficultés peine à satisfaire la demande nationale, estimée à environ 300 000 tonnes par an, obligeant régulièrement l’État à autoriser des importations pour combler le déficit.
Ludovic Amara
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