
Depuis décembre 2010, date à laquelle l’État du Cameroun a entrepris de diversifier ses sources de financement, en lançant le tout premier emprunt obligataire de son histoire à la bourse des valeurs mobilières de Douala (DSX en anglais), le pays a déjà mobilisé 8646 milliards de FCFA sur les marchés des capitaux. Le chiffre a été révélé le 27 février 2025 à Douala par Samuel Tela (photo). Le directeur de la trésorerie au ministère des Finances présentait alors un exposé intitulé « les types de financement utilisés par l’État du Cameroun », au cours d’un séminaire organisé sur le thème « les financements structurés : un outil nécessaire pour le développement des infrastructures ».
Selon les détails révélés par le directeur de la trésorerie au ministère des Finances, au cours des 15 dernières années, le Trésor public camerounais a pu mobiliser 1206,2 milliards de FCFA à la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac), le marché financier unifié des pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA), qui a absorbé la DSX dans le cadre d’un processus de fusion. Sur la même période, apprend-on officiellement, une enveloppe de 1235,7 milliards de FCFA a été levée sur les marchés financiers internationaux, à travers des émissions d’eurobonds et des placements privés.
Sur le marché des titres publics de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), l’institut d’émission commun aux six pays de la Cemac, le Cameroun a déjà mobilisé un peu plus de 6204 milliards de FCFA depuis le lancement dudit marché en 2011, révèle le directeur de la trésorerie au ministère des Finances. Sur la foi de ces chiffres, l’on peut constater que le marché monétaire est devenu le principal pourvoyeur des fonds au Trésor public camerounais. En effet, au cours de la période sous revue, le Cameroun a levé cinq fois plus de financements sur le marché des titres de la BEAC que sur les marchés financiers sous-régional et international.
Compétitivité des coûts
C’est que, après avoir lancé et réussi plusieurs emprunts obligataires sur le marché financier à partir de l’année 2010, le Cameroun s’est recentré sur le marché monétaire à partir de l’année 2019, pour des émissions des titres permettant de mobiliser les financements nécessaires à la réalisation des projets de développement et faire face aux tensions de trésorerie. Ce mouvement sera d’ailleurs suivi quelques années plus tard par les autres pays de la Cemac, reléguant ainsi les marchés financiers au second rang des destinations des États à la recherche des capitaux.
Pour expliquer cette préférence des États de la Cemac pour le marché monétaire, au détriment des marchés financiers, les experts et les acteurs des marchés des capitaux invoquent plusieurs raisons : la compétitivité des coûts, la flexibilité et la simple orthodoxie. « L’État (du Cameroun) s’est recentré sur le marché monétaire de la BEAC, qui est le marché traditionnel des Trésors publics et des banques, pour émettre des OTA (Obligations du Trésor assimilables, NDLR), dont la durée moyenne du prêt est plus longue que les emprunts obligataires (sur le marché financier, NDLR). Les OTA offrent un délai de grâce plus long à l’État, dans la mesure où le principal n’est remboursé qu’au terme de sa maturité, contrairement aux emprunts obligataires dont le remboursement intervient généralement par quart, à partir de la 2ᵉ année », explique Samuel Tela.
Ce dernier précise que sur le marché monétaire, la mise en branle d’une opération est beaucoup moins contraignante en termes de délais d’exécution. « Dans un délai maximal de 45 jours, toutes les actions incitatives, de sensibilisation, de communication et de souscription pourront être accomplies, contrairement à l’emprunt obligataire qui prend en moyenne 6 à 8 mois pour aboutir », corrobore une note interne du ministère des Finances à laquelle Investir au Cameroun a pu avoir accès. Par ailleurs, selon les acteurs et les experts financiers, contrairement aux emprunts obligataires jugés plus coûteux, les émissions d’OTA sur le marché des titres publics de la BEAC font généralement économiser au Trésor public environ 2% du montant total des souscriptions.
Brice R. Mbodiam
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