Selon les prévisions du rapport de politique monétaire de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), citées dans une note de veille du ministère français de l’Économie, la production de bois au Cameroun devrait totaliser 5,6 millions de m³ au cours de l’année 2024. Ce volume représente 47 % (contre 38 % en 2022) de la production des six pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA) abritant des activités d’exploitation forestière. L’embellie projetée au Cameroun par la banque centrale se fait au détriment de deux autres grands pays producteurs, à savoir le Congo et le Gabon. En effet, les productions dans ces pays sont annoncées à la baisse par rapport à 2022, de 44 % et 12,7 % respectivement.
La performance attendue dans la filière bois au Cameroun en 2024 traduit un engouement des opérateurs, malgré une fiscalité de plus en plus lourde au fil des années. En effet, dans la perspective de l’interdiction des exportations de grumes, qui sera progressivement mise en œuvre par les pays de la Cemac et la RD Congo à partir de 2025 (pour une entrée en vigueur totale en 2028), le Cameroun a entrepris, depuis bientôt dix ans, de surtaxer les exportations de bois en grumes et de sciages.
À ce titre, sur la période de six ans allant de 2017 à 2023, par exemple, le gouvernement camerounais a fait passer le taux du droit de sortie des grumes de 17,5 % à 60 %. Calculatrice en main, ces revalorisations successives, contenues dans les différentes lois de finances, correspondant à une hausse globale de la fiscalité des exportations de grumes de 343 % en valeur relative. Dans la loi de finances 2024, ce droit de sortie a encore été revalorisé, passant de 60 % à 75 % de la valeur FOB de l’essence. Le même droit de sortie a évolué de 165 % entre 2016 et 2023, selon les exploitants forestiers, en ce qui concerne les sciages issus de la première transformation du bois.
Cette mesure, selon les pouvoirs publics, vise à encourager principalement la 2e transformation du bois dans le pays, ce qui nécessite de nouveaux investissements. Le financement de ces investissements reste un défi, malgré les exonérations accordées par le gouvernement sur les équipements destinés à cette transformation.
Le bois camerounais très prisé
En plus de la surtaxation, contre laquelle le groupement des exploitants forestiers avait pourtant menacé de suspendre les exportations début 2023, les opérateurs de la filière bois au Cameroun ne semblent pas découragés par la hausse des coûts de production dans ce secteur. En effet, alors que la Beac projette une bonne production sylvicole au Cameroun en 2024, l’Indice des prix à la production industrielle (IPPI) au 2e trimestre 2024, publié par l’Institut national de la statistique (INS), révèle une augmentation soutenue des prix sortie-usine dans le secteur depuis 2021.
En glissement annuel, « les prix à la production dans les industries du bois ont cru de près de 12 % au 2e trimestre 2024. C’était déjà le cas en début d’année, où l’on a enregistré une hausse de près de 12,5 %. Sur un trimestre, les prix dans les industries du bois ont augmenté de 3,4 %. Notons toutefois que depuis le début de l’année 2021, les prix à la production dans les industries du bois ne cessent de croître », souligne le document de l’INS.
Le dynamisme des exploitants forestiers au Cameroun, en dépit d’une conjoncture défavorable en matière de fiscalité et de coûts de production, peut s’expliquer par l’intérêt croissant que manifeste le marché international pour le bois en provenance du Cameroun. Dans son rapport sur l’état de la compétitivité de l’économie camerounaise en 2023, le Comité de compétitivité révèle que le bois a été le produit camerounais le plus compétitif sur le marché international cette année-là.
Selon cet organisme spécialisé du ministère de l’Économie, en 2023, le Cameroun a été classé premier exportateur de « bois sapelli et iroko sciés ». Le pays s’est également distingué comme troisième exportateur de « bois tropicaux sciés », tout en apparaissant dans le top 10 des principaux exportateurs de « feuilles de placage » dans le monde.
Brice R. Mbodiam
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