
Au cours du 3ᵉ trimestre 2024, les taux d’intérêts moyens pratiqués par les banques en activité au Cameroun ont globalement chuté de 62 points, atteignant 8,29%, après 8,91% un an plus tôt. Selon le rapport de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) sur les taux débiteurs pratiqués par les établissements de crédit au cours de la période, l’embellie observée autour des taux d’intérêts bancaires est principalement portée par la baisse de la rémunération des concours financiers apportés aux PME, qui constituent l’essentiel du tissu industriel du Cameroun (environ 80%).
En effet, selon les données de la BEAC, entre juillet et septembre 2024, les taux d’intérêts bancaires au Cameroun ont progressé pour tous les autres agents économiques, sauf pour les PME et les grandes entreprises. Si pour cette dernière catégorie d’entreprise la rémunération des crédits bancaires est restée stable à 6,88% entre les 3ᵉ trimestres 2023 et 2024, pour les PME, les taux d’intérêts pratiqués par les banques ont significativement reculé. Concrètement, la baisse enregistrée est de 3,26% (326 points de base), passant de 12,24% à fin septembre 2023 à seulement 8,98% un an plus tard.
Le rapport de la banque centrale des six pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA) n’explique pas les raisons de cette sorte de magnanimité des banquiers pour les PME, pourtant souvent présentées comme le parent pauvre de l’accès au financement bancaire au Cameroun et en Afrique en général. Mais, à l’observation, cette réalité peut découler des initiatives des organismes financiers internationaux (SFI, Proparco, BEI, etc.), qui multiplient ces dernières années l’ouverture de lignes de crédit et de garantie dans les banques commerciales du pays, afin que celles-ci accordent des crédits aux PME à des taux préférentiels.
Une politique monétaire austère
Une attention particulière des bailleurs de fonds dont ne bénéficient pas souvent les particuliers, dont les taux d’intérêts moyens dans les banques ont augmenté de 77 points à fin septembre 2024, en glissement annuel. Selon les données compilées par la BEAC, ces taux se sont situés à 15,75%, contre 14,98% à fin septembre 2023. À titre de comparaison, l’on enregistre une différence de 6,77% (677 points) entre les taux moyens servis aux particuliers et ceux dont bénéficient les PME sur la même période.
Les autres personnes morales, en dehors des PME et des grandes entreprises, ne sont pas mieux loties. À en croire la banque centrale, leurs taux d’intérêts bancaires ont augmenté de 470 points entre les 3ᵉ trimestres 2023 (14,18%) et 2024 (18,88%). « Le taux débiteur moyen des crédits aux administrations publiques et aux collectivités locales a progressé entre les troisièmes trimestres 2023 et 2024, passant de 14,81% à 16,54% », rapporte encore la BEAC.
À l’analyse, cette hausse des taux d’intérêts bancaires, qui a même été drastique pour les particuliers et les autres personnes morales en dehors des PME et grandes entreprises, peut être la conséquence de la politique monétaire d’austérité mise en place par la banque centrale fin 2021, et qui s’est poursuivie jusqu’en 2024. Matérialisée par la hausse des taux directeurs de la BEAC, l’intensification des opérations de reprise de liquidité dans les banques et la suspension des injections de la liquidité dans les établissements de crédit, cette politique, selon la BEAC, visait à restreindre l’accès au crédit des agents économiques, pour combattre l’inflation. Seules les PME ont visiblement échappé à ce resserrement de l’étau autour du crédit bancaire, grâce aux facilités mises en place par les financiers internationaux ayant ouvert aux banques des lignes de crédit et de garantie spécialement dédiées aux financements de cette catégorie d’entreprise.
Brice R. Mbodiam
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