
Lors de la revue du portefeuille de la Banque mondiale au Cameroun, le gouvernement a reconnu que neuf projets sur les 17 financés par l’institution sont actuellement « à risque », soit un peu plus de 53 %. Ces projets, selon le ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), se caractérisent notamment par des retards d’exécution et de faibles taux de décaissement.
Parmi ces derniers, le Minepat, principal interlocuteur de la Banque mondiale au Cameroun, cite : le Projet d’accélération de la transformation numérique au Cameroun (Patnuc), le Projet d’électrification rurale et d’accès à l’électricité dans les régions sous-desservies (Perace), le Projet d’appui au développement de l’enseignement secondaire et des compétences pour la croissance et l’emploi (Padesce), le Projet d’urgence de lutte contre la crise alimentaire (Pulcca) et le Projet gouvernance locale et communautés résilientes (Prolog).
Pour ce qui est du Patnuc, il s’agit d’un projet financé à hauteur de 55 milliards FCFA par la Banque mondiale. Mis en œuvre depuis 2023 et placé sous la tutelle technique du ministère des Postes et Télécommunications, le Patnuc affiche un taux de consommation de crédit à mi-parcours « seulement à 15,4 % de décaissement », fait savoir Guy Ronel Guemaleu, sous-directeur de la coopération multilatérale au Minepat. « Mais la revue à mi-parcours a été effectuée et nous sommes parvenus à de très bonnes solutions qui permettraient d’accélérer la mise en œuvre de ce projet », ajoute néanmoins ce responsable.
Perace. Padesce. Pulca
De son côté, le Perace « n’est qu’à 45 % de décaissement alors qu’il clôture dans deux mois », indique Guy Ronel Guemaleu. Le Perace est mis en œuvre depuis 2021, après l’obtention d’un financement de 87 milliards FCFA de la Banque mondiale. Ce projet est placé sous la tutelle du ministère de l’Eau et de l’Énergie.
« Nous avons également le Padesce, qui est à 42 % de décaissement alors qu’il clôture en décembre », fait savoir le responsable cité supra. Ce projet, censé améliorer l’accès équitable à un enseignement secondaire de qualité et à une formation technique et professionnelle adaptée au marché, est financé à hauteur de 73 milliards FCFA par la Banque mondiale.
Quant au Pulcca, placé sous l’autorité du ministère de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales, il est financé à hauteur de 55 milliards FCFA par la Banque mondiale. Alors qu’il sera clôturé en fin d’année, il ne présente que 53 % de taux de décaissement.
Pour finir, le Prolog, approuvé en 2023 avec un financement de 172 milliards FCFA, « a été très récemment jugé modérément insatisfaisant », révèle le sous-directeur de la coopération multilatérale au Minepat.
Ce dernier ajoute cependant que « à contrario, parmi les projets à forte performance, nous avons le projet de développement du secteur des transports, nous avons le Projet d’appui à la réforme de l’éducation au Cameroun, nous avons le Pidrec, et le Projet filets sociaux adaptatifs et inclusion », souligne-t-il.
Incertitudes sur l’impact
Il convient de dire que la faible capacité d’absorption des financements disponibles est de nature à compromettre l’impact des projets soutenus par la Banque mondiale, qui visent à soutenir le développement des secteurs clés tels que les infrastructures, la santé, l’éducation ou encore l’agriculture.
Sur les raisons de ces contre-performances, le sous-directeur de la coopération multilatérale au Minepat révèle que cela est lié aux retards dans l’élaboration et la validation des plans de travail et budget annuel, mais aussi à des « prévisions qui semblent irréalistes », à la faible maîtrise des procédures de gestion sociale et environnementale, à la faible appropriation par les unités de gestion du projet du décret sur le fonctionnement de ces unités, aux lenteurs dans la passation des marchés, à la difficulté d’accès au foncier, et aux délais d’obtention des avis de non-objection.
Rappelons que dans le portefeuille de la Banque mondiale au Cameroun compte 17 projets nationaux, 15 sont actifs, pour un montant cumulé de 2 429 milliards FCFA à date. « En ce qui concerne la performance du portefeuille, rendu à avril 2025, le taux de décaissement cumulé global se situe autour de 32,76 %. Avec un âge moyen de 3,8 ans, on s’attendrait à un taux global de décaissement de 38 % au minimum. (Or), le taux de décaissement cumulé sur l’année fiscale est de 16,36 %. Donc on espère obtenir les 20 % qui ont été indiqués d’ici au 30 juin. Le solde engagé non décaissé est effectivement, comme de l’ordre de 3 014 millions de dollars (soit 1 844,4 milliards FCFA) », révèle Guy Ronel Guemaleu.
Pour sa part, le directeur de la division de la Banque mondiale pour le Cameroun, Cheick Fantamady Kanté, fait savoir qu’en effet, à date, le volume total des fonds non décaissés représente 69 % du montant des engagements (…). En mars 2025, le taux de décaissement annualisé, c’est-à-dire si tout reste constant, est de 15 %, contre une cible annuelle de 20 %. Cette contre-performance perdure depuis l’année fiscale 2018, au cours de laquelle le taux de décaissement a atteint 17,9 %.
Ludovic Amara
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