Selon le projet de loi de finances 2025 actuellement en examen à l’Assemblée nationale, les besoins de financements de l’État du Cameroun en 2025 se chiffrent à 1795 milliards de FCFA. Afin de mobiliser cette enveloppe en baisse de 275,1 milliards de FCFA par rapport à l’exercice budgétaire 2024, le Trésor public devra recourir aux emprunts. Pour ce faire, il est prévu, dans le document soumis à l’examen des députés, des emprunts d’un montant total de 600,6 milliards de FCFA sur le marché domestique.
Dans le détail, des emprunts d’un montant de 220,6 milliards de FCFA sont prévus sur le marché bancaire. Tandis que 380 milliards de FCFA devraient être mobilisés par émissions de titres publics. Au regard du montant à mobiliser, en dehors des opérations de levées de fonds sur le marché des titres publics de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), dont le Cameroun est parmi les principaux animateurs depuis son lancement en 2011, il se profile à l’horizon un nouvel emprunt obligataire sur le marché financier unifié des pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA), basé à Douala.
Sur tous ces marchés, la tâche ne s’annonce pas du tout facile pour le Trésor public camerounais, au regard des conditions devenues de plus en plus difficiles. « Avant, j’avais un job excitant. Depuis quelques temps, il est devenu stressant. Nous levions avec beaucoup d’aisance les ressources sur le marché. Aujourd’hui, nous avons de la peine à refinancer nos remboursements…», confesse le directeur de la trésorerie au ministère des Finances. Samuel Tela, qui résume ainsi les déboires actuels du Cameroun sur le marché des titres publics de la BEAC, s’exprimait ainsi le 27 novembre 2024 à Yaoundé. C’était au cours de la «Finance Week», événement organisé sous le thème : « marché domestique des capitaux : un levier de croissance économique pour la Cemac ? ».
En effet, depuis l’année 2022, l’on assiste à un relèvement des taux d’intérêts sur le marché des titres publics de la BEAC. A travers cette pratique, certains États à la signature moins reluisante que celle du Cameroun, réussissent souvent à détourner les investisseurs des titres émis par la locomotive économique de la Cemac, plutôt portée sur la pratique des taux d’intérêts contrôlés.
« Nous essayons de faire comprendre aux banques, c’est-à-dire les SVT (spécialistes en valeurs du trésor), que l’essentiel n’est pas d’aller chercher des taux d’intérêt de 7% dans les autres pays. Il faut regarder aussi le risque. Nos titres de courts termes sont autour de 4%. Mais, il y a des pays dans la Cemac qui offrent jusqu’à 7%. (…) Le même phénomène est observé sur les titres de longs termes, sur lesquels il y a des décotes énormes. C’est-à-dire qu’on affiche un taux de 7%, mais derrière il y a des décotes très élevées. Ce qui vient dénaturer la transparence et même tout le système », se plaignait déjà le directeur général du Trésor du ministère des Finances, Sylvester Moh, au cours d’une rencontre à Douala en février 2023.
À la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac), le marché financier unifié des pays de la Cemac, la météo n’est pas clémente non plus. Les mauvais signaux que renvoie ce marché (hausse des taux d’intérêts des banques qui y opèrent à travers leurs sociétés de bourse, NDLR) sont tels que le Cameroun a dû surseoir à son emprunt obligataire de l’année 2024, d’un montant de 200 milliards de FCFA. Le Gabon et la Bdeac, qui s’y sont aventurés cette année en lançant des emprunts obligataires respectifs de 50 et 150 milliards de FCFA, ont dû proroger d’un mois les périodes de souscription initiales, pour pouvoir récolter les enveloppes recherchées.
Brice R. Mbodiam
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