Haman Mana, connu pour sa plume acérée, y dresse une « chronique de l’inexplicable », retraçant ce qu’il perçoit comme la déliquescence d’un pays. L’auteur, mobilisant l’ensemble des outils journalistiques – reportages, portraits, enquêtes, interviews, analyses – dissèque les quatre décennies de gouvernance de Paul Biya qui a aujourd’hui 92 ans dont 42 au pouvoir.
Le projet de cet ouvrage, initié au sein de la Medill School of Journalism de la Northwestern University aux États-Unis, se présente comme une vaste fresque politique et sociale. Bien qu’écrit à distance, l’auteur s’appuie sur une connaissance intime du Cameroun pour tenter de rendre intelligible ce qu’il décrit comme un pays stagnant entre immobilisme et précarité, sous la direction d’un « potentat nonagénaire ». L’ambition déclarée d’Haman Mana est de s’adresser non seulement à ses contemporains, mais aussi aux générations futures, en documentant le présent, pour éclairer l’avenir.
La structure du livre alterne entre une approche diachronique retraçant les événements historiques marquants du régime ; et une approche synchronique qui éclaire les constantes et les dysfonctionnements profonds du système Biya : Clientélisme, opacité, répression, effritement des institutions.
L’écriture quant à elle se veut libre, parfois mordante, mais toujours documentée. Chaque chapitre propose une analyse journalistique fouillée sur des personnalités, des faits marquants, des scandales, ou des évolutions sociopolitiques qui ont façonné le Cameroun contemporain. En définitive, « Les Années Biya » se veut à la fois une œuvre d’engagement et une archive critique, à mi-chemin entre le journalisme et l’histoire. Haman Mana s’y positionne comme un « historien de l’instant », s’inscrivant dans la tradition d’un Albert Camus par son souci constant de documenter le présent pour mieux comprendre le futur.