« Toute personne qui entre au Cameroun ou qui en sort, est tenue de se soumettre au contrôle de la police des frontières » ; « Tout Camerounais qui désire quitter le territoire national doit présenter à l’autorité compétente de police un passeport en cours de validité » ; « Est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 2 ans et d’une amende de 100.000 à 2 millions de francs tout camerounais ou étranger qui sort du territoire nonobstant réquisition des ministres chargés du contrôle de l’Etat, dûment notifiée des autorités judiciaires, des finances, de la fonction publique et du travail et de la prévoyance sociale ». Tels sont respectivement les articles 1, 2 et 3 de la loi 90/043 du 19 décembre 1990, fixant les conditions d’entrée, de séjour et de sortie du territoire camerounais. Ces textes ont fait l’objet de critiques ce 19 décembre 2024, au cours d’une conférence organisée par l’Organisation non gouvernementale (ONG) Un Monde Avenir.
Pour Philippe Nanga, coordonnateur de cette organisation, l’article 3 de cette loi pose deux principaux problèmes. D’une part, elle criminalise la migration et d’autre part, elle ne fait pas de différence entre celui qui est parti du Cameroun de manière irrégulière et celui qui est parti de manière régulière. Les deux sont soumis aux mêmes sanctions. « Aujourd’hui, nous pensons qu’il faut surseoir l’application de cette loi dans un premier temps parce qu’il faut protéger les citoyens camerounais quand ils sont de retour chez eux, quelle que soit la situation dans laquelle ils étaient là-bas », a indiqué Philippe Nanga. Et de poursuivre : « nous ne sommes pas en train de dire qu’un citoyen camerounais qui a commis un crime à l’extérieur ne soit pas poursuivi par des juridictions locales. Nous sommes en train de dire qu’un migrant qui, dans le cadre de son parcours migratoire s’est retrouvé en situation dite irrégulière et qui rentre au Cameroun, doit être protégé et accompagné pour être réintégré socialement. C’est important parce que nous gagnons à recevoir un des nôtres qui est parti et qui n’a pas pu s’en sortir et qui revient vers vous. Nous gagnons à l’encadrer et à le réinsérer et à contribuer au développement du pays », a-t-il précisé.
Cette conférence se tient en marge de la journée internationale des migrants qui se célèbre chaque 18 décembre. Elle se tenait sous le thème « Migrants pas criminel ! Non à la double peine : refoulement + incarcération au retour ». En fait, « il est urgent que nous puissions humaniser cette loi pour que plus jamais, on n’ait des doubles peines », a souligné Epoko Epoko, représentant du ministère de la Jeunesse et de l’Education civique (Minjec). Pour Alain Koum, secrétaire des affaires étrangères au ministère des Relations extérieures (Minrex), « c’est une problématique qui est vraiment au cœur de la construction de cette politique migratoire que nous sommes en train de penser ».
Au sortir de cette rencontre, plusieurs plaidoyers ont été formulés parmi lesquels la mise en place par le gouvernement d’un cadre de réflexion qui aboutira à l’abrogation de cette loi ou encore la suspension temporaire de son application en attendant son abrogation définitive. Un Monde Avenir est une organisation camerounaise qui, depuis 20 ans, œuvre pour le développement social et la participation citoyenne. Ses activités sont axées sur l’accès aux droits, la lutte contre les discriminations, la mobilisation des publics et l’éducation à la citoyenneté.
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