Par Henri KOUAM, Directeur CEPI
Introduction
Le libre-échange est-il bénéfique pour les pays en développement ? Après tout, l’accord commercial du Cameroun avec l’Union européenne a entraîné des pertes importantes pour l’autorité portuaire et le gouvernement. Au cours des six premiers mois de 2023, le Cameroun a perdu un total de 8,6 milliards de francs CFA en recettes douanières en raison de la mise en œuvre de son accord de partenariat économique (APE). Cela représente une augmentation de 61 % par rapport à la même période en 2022, selon les données fournies par la Direction générale des douanes.
Malgré cela, il est clair que le libre-échange améliorera le niveau de vie des Camerounais et réduira les prix des denrées alimentaires. Avant de plaider en faveur du libre-échange, nous devons tout d’abord comprendre les progrès réalisés dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA). Dans cet article, nous examinons les progrès réalisés jusqu’à présent dans le cadre de la zone de libre-échange continentale africaine et nous illustrons les principaux protocoles conclus. Le raisonnement est simple : pour défendre le libre-échange, il faut d’abord le comprendre.
“Nous ne pouvons pas plaider en faveur du libre-échange si nous ne le comprenons pas. Même si les ports et la législation nationale sont en train d’être modifiés pour s’adapter à l’ALEAC, il est important de faire le point sur la situation après cinq ans”
Le 19 février 2023, l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine (UA) a adopté trois nouveaux protocoles à l’accord sur la zone de libre-échange continentale africaine, portant sur l’investissement, les droits de propriété intellectuelle et la politique de concurrence, ce qui place cette zone bien au-dessus des autres accords de libre-échange.
Phase I : Commerce des marchandises, des services et règlement des différends
Bien que le commerce dans le cadre de l’accord soit autorisé, les négociations se poursuivent sur divers points tels que les listes tarifaires, les règles d’origine, les lignes directrices sur les recours commerciaux et les engagements en matière de services pour les cinq secteurs prioritaires de la libéralisation (transports, communications, services financiers, tourisme et services aux entreprises). La première phase a été achevée, mais des pays comme le Cameroun doivent supprimer les politiques qui empêchent unilatéralement les réseaux étrangers d’entrer sur le marché camerounais. Les Nations unies estiment que l’internet est cher au Cameroun et la concurrence pourrait changer la donne.
« Promouvoir le commerce intra-africain sans libéraliser des secteurs clés comme la communication ralentira le rythme de l’intégration, augmentant les prix de l’internet pour les consommateurs et leurs espoirs d’un développement plus rapide seront anéantis par le protectionnisme et le manque de volonté de s’adapter à la concurrence”.
Phase II : droits de propriété intellectuelle, investissements et politique de concurrence
Les négociations pour la phase II ont commencé et ont été perturbées par la pandémie de COVID-19, ce qui a entraîné des retards. Toutefois, les négociations visant à conclure les protocoles en suspens de la phase II sont bien avancées et devraient être achevées prochainement. La phase II a été achevée et approuvée par l’Assemblée générale de l’UA.
Phase III : Commerce numérique et participation des femmes et des jeunes au commerce
Les négociations pour la phase III commenceront dès l’achèvement de la phase II, qui est toujours en cours de négociation et devrait être prête d’ici la fin de l’année 2024. Les femmes et les jeunes ont tendance à être marginalisés dans l’espace politique, mais la ZLECA cherche à changer cela. Nous ne pouvons pas oublier que l’Afrique est le continent dont la population est la plus jeune au monde. En 2023, environ 40 % de la population était âgée de 15 ans ou moins, contre une moyenne mondiale de 25 %.Il est essentiel de veiller à ce que les jeunes à court d’argent puissent commercer efficacement dans le cadre de la ZLECA, mais au- delà des protocoles, cela implique de les sensibiliser aux procédures d’exportation, de vulgariser le financement du commerce et de permettre activement la communication entre les jeunes exportateurs et les agents commerciaux. Cependant, ce protocole est la première étape pour s’assurer que les jeunes ont une chance d’exporter.
Il faudra féliciter les gouvernements africains et l’AU pour les progrès réalisés jusqu’à présent. Les bases du libre-échange sont désormais posées et les pays pourront bientôt commencer à commercer pleinement dans le cadre de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA). Maintenant que les bases du commerce ont été jetées et que l’ »Initiative pour le commerce guidé » est opérationnelle, l’Afrique est prête à commencer à commercer avec des droits de douane nuls.
« Les pays doivent veiller à ce que les entreprises et le secteur privé soient bien informés des procédures commerciales prévues par la zone de libre-échange continentale africaine. Après tout, c’est le secteur privé, et non le gouvernement, qui accélèrera la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) ».
Conclusion
Tout en restant heureux et enthousiastes face à cette perspective, nous devrions savoir où nous en sommes. Après tout, nous ne pouvons pas promouvoir quelque chose que nous ne comprenons pas. Quoi qu’il en soit, une chose mérite d’être rappelée. Le libre-échange stimulera le développement économique de l’Afrique, soutiendra la croissance des revenus réels et favorise le développement inclusif. Cependant, cela ne sera pas possible sans des politiques quantifiables qui cherchent à améliorer les compétences des individus, des entreprises et des groupes pour assurer une compétitivité plus rapide et plus grande à moyen terme. L’absence de mesures quantifiables pourrait compromettre l’accélération du commerce sans droits de douane et l’intégration des chaînes de valeur.
Les bases ont été posées avec la finalisation des protocoles commerciaux ; nous devons maintenant comprendre ce qu’ils signifient pour nous au niveau local, adapter les règlementations et la législation le cas échéant, et créer un cadre permettant aux entreprises et aux particuliers de commercer efficacement. La zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) ne sera pas mise en œuvre si nous ne comprenons pas comment nos barèmes tarifaires sont appliqués. Le libre-échange concerne les personnes, mais pour que les gains en termes de développement deviennent une réalité, les Africains doivent le comprendre et s’impliquer dans sa mise en œuvre.
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